France-Futsal est allé à la rencontre de l’équipe de futsal de l’État de Pondichéry, Etat du sud-est de l’Inde, ancien comptoir français, qui a réussi l’exploit de remporter les Nationaux de Futsal du pays le 23 février dernier à Kochi, face au Tamil Nadu, sous l’impulsion notamment d’un français, Cédric Leroy, Directeur Technique de la…
France-Futsal est allé à la rencontre de l’équipe de futsal de l’État de Pondichéry, Etat du sud-est de l’Inde, ancien comptoir français, qui a réussi l’exploit de remporter les Nationaux de Futsal du pays le 23 février dernier à Kochi, face au Tamil Nadu, sous l’impulsion notamment d’un français, Cédric Leroy, Directeur Technique de la Futsal Association of Pondicherry, et originaire de Guyancourt. Une aventure sportive et humaine qu’à décidé de vous faire partager France-Futsal, via cet entretien avec le Directeur technique de l’équipe la plus « frenchy » de ce pays.
Cédric, pourriez-vous vous présenter ainsi que votre parcours ?
Bonjour. Je m’appelle Cédric Leroy. J’ai 32 ans, originaire des Yvelines et je voyage régulièrement en Inde depuis 8 ans. Je me suis fixé à Pondichéry il y a quelques temps. Je suis passé par des clubs locaux de foot à 11 dans les Yvelines (Vélizy, Bois-d’Arcy, Guyancourt). J’ai commencé par le foot à 11, le futsal n’étant pas très développé quand j’étais jeune. Par la suite, je me suis orienté vers le club de futsal de Guyancourt, et j’y suis maintenant depuis cinq ans en tant que joueur, et dirigeant depuis deux ans. Je suis notamment titulaire des modules initiation et perfectionnement futsal FFF. Je suis également titulaire d’une formation STAPS, spécialisé dans l’organisation d’événements sportifs. Je me suis aperçu, il y a quelques années, via le lycée français de Pondichéry, qu’on y jouait au futsal, dans une salle adaptée à la pratique. Je suis aujourd’hui Directeur Technique de la Futsal Association of Pondichéry, Responsable des relations internationales pour City 5, et Responsable de la catégorie Futsal pour l’ES Guyancourt.
Actuellement à Pondichéry, pourquoi avoir jeté votre dévolu sur cette ville et pouvez-vous nous présenter cet ancien comptoir français devenu indépendant en 1956?
Je suis arrivé à Pondichéry un peu par hasard. Lorsque l’on voyage pour la première fois en Inde, et de surcroît seul, avec un sac à dos, on a toujours besoin d’avoir quelques repères. J’ai eu besoin de faire un vrai break dès l’obtention de mon diplôme en France, et j’ai décidé de pointer Pondichéry dans mon voyage, pensant que l’attache francophone pouvait être pour moi un bon point d’entrée facilitant ma venue. Pondichéry est une ville où la présence française est toujours vivace, avec un consulat général de France présent dans la ville, un lycée français, l’alliance française ; la culture française est donc bien présente dans la ville, et bien vécue par les habitants. Pondichéry est une ville mais également un Etat à part entière (dans la Fédération des États indiens), composé de 4 anciens comptoirs français (Pondichéry, Karikal, Mahé, Yanaon), disséminés sur la côte indienne. La présence française est donc toujours bien visible, et cela crée certaines facilités, notamment en se basant sur des personnes originaires de Pondichéry et vivant en France, qui nous permettront de développer notre projet futsal dans la ville; avec cette idée de créer un mélange entre les joueurs locaux ici et les joueurs français d’origine pondichérienne.
La ville est vraiment orientée vers son centre dans lequel il y a un ancien quartier français (la « Ville Blanche »), qui est un quartier colonial. La seconde partie de la ville, la plus importante, est la partie tamoule. Cette « identité française » fait aujourd’hui venir, notamment les week-ends, de nombreux touristes indiens, de Delhi, Chennai ou encore Bombay. Beaucoup d’investisseurs viennent aussi à Pondichéry pour faire de cet argument colonial un argument touristique. La culture locale est une culture tamoule, et les quartiers tamouls sont aujourd’hui moins bien préservés en raison de l’urbanisation. La culture tamoule est très riche, de type dravidienne, (sujet sensible : et résiste à l’influence de l’hindi). C’est le tamoul qui est exclusivement parlé à Pondichéry. En dehors de ces 2 quartiers, nous pouvons trouver la zone d’Auroville, une ville expérimentale située à une dizaine de minutes de Pondichéry.
Venons-en au futsal, pourriez-vous présenter aux lecteurs de France-Futsal votre projet ainsi que sa genèse ?
Nous avons en réalité trois entités : premièrement, le club du City 5, basé à Pondichéry, créé il y a 3 ans par mon associé Pradeep Tillai et qui compte environ 200 licenciés. Cette structure est composée d’une équipe seniors, d’une école de futsal, d’une équipe U18, ainsi que d’autres catégories jeunes.
Deuxièmement, en France, nous dirigeons la section futsal de l’ES Guyancourt, dans le District des Yvelines. Une section qui est composée d’une catégorie senior et qui a vu le jour il y a huit ans, plutôt loisirs au départ. L’équipe a pris une autre dimension il y a environ trois ans, sous l’impulsion de Sébastien Arago, coach de l’époque. L’ESG futsal est actuellement en D1 de District.
Enfin, à Pondichéry toujours, et en plus du club de City 5, nous avons aussi créé l’année dernière la Fédération de Futsal de Pondichéry (FAP) avec mes collaborateurs Pradeep Tillai (Secrétaire Général FAP) et Aroun Tillai (Président de la FAP), avec laquelle nous avons gagné le titre national de futsal d’Inde en 2019. La FAP est une sélection à visée de compétition, qui devrait permettre une exposition nationale des joueurs locaux. Nous avons en effet un intéressant vivier de joueurs ici, mais ces derniers ont du mal à trouver leur place, passant le plus souvent après les joueurs de Chennai, la capitale du Tamil Nadu. (Les joueurs de Chennai se présentaient plus volontiers dans la sélection de Pondichéry pour disputer le championnat des Etats d’Inde). C’est pour cela que nous avons décidé de recentrer nos efforts de la sélection sur les joueurs habitant à Pondichéry.
Pourriez-vous nous présenter votre Championnat ?
Nous sommes une toute jeune fédération, créé l’année dernière, avec une structuration actuelle d’un Championnat qui est en cours. Pour l’instant, nous avons des matchs amicaux mais pas de Championnat officiel, entre des équipes comme les clubs de City 5, Woga, Kuppuraj ou encore Auroville entre lesquels on sent clairement la rivalité. Cette rivalité est une rivalité forte, entre des clubs qui s’opposent ouvertement et même parfois ennemis. L’ambiance est tendue et les matchs très disputés, et à défaut d’avoir un championnat créé, il y a clairement un enjeu lors des matchs.
Vous venez de remporter les Nationaux de Futsal*. Bravo. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette compétition ?
La compétition que nous avons joué sont les Nationaux de Futsal, dépendant de la FAI (Futsal Association of India) fondé en 2008 et affilié à l’AMF en 2011. Ces nationaux regroupent chaque année l’ensemble des Etats indiens (36 au total). Il y avait quelques absents, par exemple East Bengal ou encore Mizoram. Cette année la compétition a eu lieu en février à Kochi, la capitale du Kérala, et l’année prochaine les Nationaux auront lieu à Delhi. Cette Coupe dure une semaine et est composé de poules de 5 équipes. Après être sorti de la poule, il s’agit de confrontations directes jusqu’au titre de champion. Nous avons joué au final 6 matchs : contre Telangana (1-1), contre Sikkim (1-0), contre Chandigarh (2 à 0) et le contre le Jharkhand (3-0) puis en quart face à Delhi (3 à 1), Maharashtra en demi (6 à 0) , pour jouer enfin une finale épique contre le Tamil Nadu** (4 à 4 à la fin du temps réglementaire, et victoire aux tirs au buts 3 à 2).
* qui est une Coupe annuelle entre les Etats indiens, l’Inde étant une fédération d’états. ** Pondichéry est entouré de l’Etat du Tamil Nadu (exclave).
Qu’est-ce qui vous a rendu le plus fier ?
Ce qui nous a rendu le plus fier est d’avoir pu donner la chance a des joueurs locaux de représenter fièrement l’équipe de Pondichéry. C’est aussi d’avoir pu montrer à l’Etat du Tamil Nadu (ndlr Pondichéry est entouré par le Tamil Nadu) que les joueurs pondichériens avaient toute leur place en comparaison avec les joueurs de ce grand Etat, qui évoluent pour la plupart à un niveau plus élevé. Nos joueurs se sont vraiment montrés, et cela est très positif.
Quel état d’esprit vous a animé tout au long de la compétition ?
Nous n’avions pas vraiment de prétention en jouant dans la compétition, en tant que nouvel arrivant. Nous étions vraiment dans la découverte. Nous avons été assez surpris d’arriver jusqu’au bout. Notre premier match, contre Telangana (1-1), était vraiment une prise de température. Et puis nous avons essayé d’axer notre travail sur la psychologie et le dépassement de soi avec mon adjoint Diez Glai (coach de l’ES Guyancourt Futsal). Nous étions fiers de représenter les couleurs de Pondichéry au plus haut-niveau. Notre second match a été plus positif, contre Sikkim, qui est une des équipes du nord-est, qui a son propre championnat semi-professionnel, contre qui ont a gagné 1 à 0. C’est à partir de cette victoire que l’on s’est dit que rien n’était impossible.
Comment a été perçu votre victoire par les autres équipes et, notamment votre côté « frenchy » ?
Nous avons été plutôt bien reçu. Des coachs d’autres équipes venaient même nous voir pour nous demander des conseils, alors que c’était notre première participation! Nous avons amené toute une méthodologie : conditionnement psychologique, massage, nutrition… Les coachs locaux nous ont très bien reçu. Mais il est clair que la plupart des organisateurs ont été stupéfaits de nous voir gagner car personne ne s’y attendait. Cela a été une belle surprise pour la Fédération, mais aussi un fait un peu particulier qu’une nouvelle équipe et des coachs étrangers l’emportent face à des coachs locaux qui ont même coachés dans la Premier League indienne (ligue de futsal privée dans laquelle nous avons pu observer des joueurs tels que Ronaldinho, Salgado, Kévin Ramirez pour ne citer qu’eux).
Quelle a été la couverture et les retombées médiatiques de ces nationaux indiens pour vous ?
Nous avons été surpris du manque sur place de journalistes nationaux sur cette compétition. Nous avons nous-même effectué un travail de communication puisque cela fait partie de nos compétences. L’idée était de valoriser notre performance et mettre en lumière notre projet. Par exemple, nous avons eu le droit à des pleines pages dans le Times of India ou encore The Hindu. Nous avons également eu une diffusion large sur des sites de football indien et sur les réseaux sociaux. Nous avons une très belle couverture et nous en sommes très heureux.
Quels sont les ambitions de votre Fédération, sportivement parlant, et comment comptez-vous vous développer ?
Notre premier objectif sera de structurer un championnat de qualité à Pondichéry. En donnant la priorité aux joueurs locaux, notamment afin qu’ils aient l’opportunité de décrocher un contrat professionnel dans la Futsal Premier, qui recrute dans les Championnats nationaux. Nous avons notre gardien, Vinoth, qui a été élu meilleur gardien et qui y mérite sa place. Si nous pouvions créer un mix indo-français, cela pourrait être bien. Nous aimerions pouvoir nous montrer au niveau national et international, pourquoi pas. Nous allons tenter d’envoyer notre équipe en France prochainement. Nous avons déjà évoqué cette possibilité avec notre ambassadeur Kévin Ramirez (joueur d’ACCES Futsal).
A titre personnel, quels sont vos projets pour participer au développement du futsal indien ? Quel lien avec la Futsal Premier ?
Notre ambition est bien entendu d’envoyer des joueurs en Futsal Premier (qui est une ligue privée), en les faisant bénéficier de notre vision française du futsal. Nous allons nous ouvrir aux écoles, aux entreprises. Nous allons essayer de créer une synergie entre le futsal et le football, pour que les deux disciplines se développent.
Un mot de la fin ?
Je suis très fier de partager cette aventure avec mes amis de Pondichéry et de Guyancourt, mes villes d’origine et de coeur. Je souhaite mettre en lumière Mr Guy Galanti, Président de l’ES Guyancourt, et Mr Jacques Chassaing, qui ont été les premiers à croire en nous. J’espère enfin pouvoir croiser les lecteurs de France-Futsal sur les terrains de Pondichéry ou de Guyancourt!
Pourriez-vous répondre à ces quelques questions ?
- Film préféré: Coco (film Tamoul, avec Vinoth Charles, qui est un acteur tamoul)
- Plat préféré: Le couscous, le biryani
- Club de futsal préféré: Acces en France
- Championnat préféré: le championnat de France, destiné à être un grand championnat dans les années à venir, avec le soutien de la FFF.
- Futsaleur préféré: Kevin Ramirez, pas parce qu’il nous soutient, mais parce que je suis admiratif de son parcours et de ses expériences à l’étranger (notamment en Inde). Puis Osredkar le slovène.
- Le futsal est-il du football?: Le futsal est définitivement du football, et ce sont deux sports complémentaires. La maîtrise technique est la même. Ce débat n’est posé qu’en France.
Vous pouvez suivre les aventures de City 5 Pondy sur leur page facebook dédiée.
Carte de Pondichéry: