Il est arrivé il y a quelques semaines sur le banc de Roubaix AFS. France-Futsal est allé à la rencontre du coach apprécié et plébiscité, Nordine Benamrouche, sans doute l’un des plus beau palmarès du futsal hexagonal. Le coach franco-algérien, qui officiait chez le champion de France l’an passé, s’est longuement confié sur son actualité, son riche parcours et ses ambitions, son passage remarqué à Garges, son club actuel de Roubaix, et a aussi évoqué…l’Algérie.

FF: Coach BENAMROUCHE, bonjour. Merci de nous accorder cet interview. Pourriez-vous vous présenter, pour ceux qui ne vous connaîtraient pas encore ? Quel a été votre parcours ?

N. Benamrouche: « Je vis une vie paisible dans la ville de Wattrelos (ndlr: département du Nord) où j’essaie d’être un bon fils, un bon mari (force à mon épouse – rires) ainsi qu’un bon père, ce qui est pour moi le plus important. Pour mon parcours, j’ai été, il est vrai, un footballeur assez moyen (niveau Ligue), avec, dès mon plus jeune âge, des intentions de prendre des responsabilités. Raison pour laquelle en 2004 j’ai dû passer un Brevet d’État d’Éducateur Activité Physique pour Tous (capitaine et accompagnement d’équipe de jeunes). En ce qui concerne le Futsal, j’ai connu les prémisses de ce sport à l’âge de 12/13 ans avec les acteurs sociaux que je fréquentais étant adolescent. J’ai poursuivi ma « carrière » de joueur avec le Futsal Entreprise, et j’ai  longtemps été joueur en D1 Belge d’un Championnat provincial.

Pour la partie Entraîneur/Éducateur, j’ai débuté ma première expérience en 2003 sur la ville de Roubaix, dans un petit club de quartier (ASC 3 Ponts), dans lequel j’ai fait toutes mes classes, de l’Initiateur 1 au Brevet d’État Football en 2008, avec des missions axées sur l’éducation et les valeurs humaines. J’ai réussi  à avoir quelques résultats  (création et montées des équipes jeunes et première, structuration du club). En parallèle, j’ai pris la décision de m’orienter vers un diplôme belge de Futsal  car je suis frontalier et que la France n’avait, à l’époque, pas encore de réelle envie de développement de la discipline (saison 2005-2006).

C’est à ce moment que j’ai eu la possibilité d’intégrer le staff de Roubaix Futsal (2004) par le biais d’un grand Monsieur, Mr. Laouar Malik, que je ne remercierai jamais assez, car j’officie, aujourd’hui encore, sur les parquets de France et de Navarre. C’est à Roubaix que j’ai obtenu mon diplôme national belge (2008), ainsi que la possibilité d’animer comme formateur  les premières formations de Futsal dans ma Ligue, accompagné de Mr David Méresse, (adjoint de l’équipe de France de Futsal de 2004 à 2015). J’ai également été adjoint en sélection régionale puis sélectionneur (en Ligue) pendant deux années. J’ai eu, à Roubaix Futsal, de 2004 à 2011, la possibilité de participer et gagner trois Coupes de France de futsal (ndlr : en 2005, 2006 et 2008), grâce à une superbe équipe, constituée de vrais hommes, qui donnèrent la possibilité de participer à 3 Ligues des Champions (organisées en Angleterre, Écosse et Roumanie). Je suis également le premier coach à avoir gagné le Championnat National (ndlr : ex-Challenge National saison 2007-2008), toujours avec le club de Roubaix.

Ensuite, j’ai quitté Roubaix en 2010/2011 en direction de Douai Gayant Futsal, que j’ai contribué à hisser de la Division d’Honneur à la D1 (saison 2014-2015), club que j’ai finalement quitté par la suite en cours de saison (ndlr : pour entraîner exclusivement pendant un an et demi le club de de football de Roubaix-Tourcoing Portugais, évoluant alors en DH).

C’est en 2016 que je signe à Garges Djibson, club dans lequel je rencontre la seconde personne importante dans mon parcours – Jean-Patrice Mendy -, qui m’apportera un nouvel élan. J’arrive dans un club au sein duquel je retrouve immédiatement une famille extraordinaire, une ambiance et une solidarité que je n’ai connu nulle part ailleurs. J’ai pu mettre à contribution toutes mes compétences, avec un super accompagnement. Nous avons été champions de France dès la première saison (2016-2017), et sur la seconde, nous réussirons à atteindre les demi-finales du Championnat ainsi que la finale de la Coupe de France. C’est en octobre 2017 que j’ai eu l’honneur de participer à ma quatrième campagne en Ligue des Champions UEFA organisée en Croatie.

Pour des raisons familiales mais aussi professionnelles, je décide de mettre fin à ma collaboration en tant qu’entraîneur avec Garges en juin 2018 – à mon grand regret -, club avec lequel je resterai en étroite collaboration jusqu’en décembre 2018, dans le cadre de la structuration du club.

Début janvier 2019, j’ai décidé de m’engager avec l’équipe première du club de Roubaix AFS (D1), après m’être occupé des U15 auparavant.

Pour terminer, j’ai entamé, depuis octobre 2018, la formation Certificat Futsal Performance avec les staffs des équipes de France, et notamment messieurs Jacky, Plumecocq et Reynaud, avec lesquels je continue mon apprentissage. »

FF: Vous qui étiez champion de France avec Garges et ayant participé à la Ligue des Champions l’an passé; vous venez de vous engager, à la surprise générale, avec le club de Roubaix, actuel sixième du Championnat. Est-ce un choix avant tout sportif ou un choix du coeur pour votre région natale ?

NB: « Comme je vous l’expliquais dans votre première question, ce n’est pas du tout un choix de retour dans ma région, car Garges est le club où j’ai passé mes plus belles années de coach. En revanche, en janvier 2019, je ressentais le besoin d’un nouveau challenge, et le club de Roubaix m’a donné l’opportunité de reprendre du service car ils avaient besoin d’un nouveau souffle. »

FF: Alors que tout se passait pour le mieux à Garges Djibson, et que vous aviez la confiance du président l’an passé, vous avez fait le choix de partir en très bon termes. Pourquoi êtes-vous parti de Garges, après un bilan plus que positif ? (champion de France 2018, parcours prometteur en Ligue des Champions, dernier carré en Coupe Nationale). Quelles sont les raisons de votre départ ?

rajNB: « Mon départ est lié à des raisons familiales, professionnelles et de grosse fatigue mentale (5 trajets allers/retours par semaine en plus de mon travail de Coordinateur de structure jeunesse à la Ville de Watreloos). En effet, le club de Garges, par le biais de son Président, m’a toujours soutenu et accompagné durant les deux années au sein du club. »

FF: Racontez-nous comment s’est préparée votre venue à Roubaix AFS ?

NB: « J’étais en contact avec le club depuis plusieurs mois, par le biais des MM. Haroun et Touag. Pour le bon déroulement de ma formation, j’ai pris dans un premier temps l’équipe des U15 de Roubaix (Novembre/Décembre 2018), pour basculer dans un second temps en équipe première. »

FF: Votre arrivée s’inscrit dans le cadre d’un grand projet de structuration du club de Roubaix AFS à long terme, qui va bien au-delà de l’équipe première. Pourriez-vous nous en dire plus ?

NB: « Mon envie, est, à ce jour, la création d’une Académie de Futsal Élite pour laquelle j’ai été reçu par Monsieur le Maire de la Ville de Roubaix (ndlr : Guillaume Delbar). En ce qui concerne mon investissement au sein du club de Roubaix AFS, ma première mission est de maintenir l’équipe une en D1 et d’apporter une plus-value dans la structuration du club. »

FF: Quel bilan humain tirez-vous sur le jeu de l’équipe depuis votre arrivée début janvier ? Lors de votre première prise de contact avec les joueurs, dans quel état physique et mental les avez-vous trouvés ?

NB: « La façon de gérer mon groupe m’est propre et il est important de préciser que chaque coach a sa façon de travailler. J’ai trouvé un groupe fragile sur l’aspect mental, avec à mon goût de grosses lacunes aux niveaux athlétique et défensif. À ce jour, le groupe est en progression constante, mais le temps ne me permet pas de travailler dans les meilleures conditions car il reste peu de matchs. Les garçons que j’ai aujourd’hui sont  « durs au mal » et dépensent  beaucoup d’énergie sur les 4 séances de la semaine. Humainement, de bons hommes sont à mes côtés et ont envie de porter le projet du club en s’investissant à 100%. »

FF:  Que leur avez-vous dit pour qu’ils retrouvent l’envie, la motivation, quelques jours après l’élimination aux tirs aux buts en Coupe contre Orchies ?

NB: « Suite à l’enjeu du maintien, la Coupe de France était un bonus pour les joueurs. De plus, l’effectif réduit que j’entraîne est touché par la fatigue et les blessures. »

FF: Avec une prometteuse sixième place et un visage très différent avec celui de l’an dernier, votre venue, ainsi que celle de Djamel Haroun (le portier de l’équipe de France) sont-elles prépondérantes  dans le changement de dimension de Roubaix AFS cette saison ? Quel(s) rôle(s) avez-vous en dehors du terrain à Roubaix ?

NB: « Nous sommes passés à ma grande surprise à la sixième place du classement depuis ce week-end et nous pensons qu’une victoire supplémentaire nous permettrait de participer au Championnat de Ligue 1 la saison prochaine. Mr Haroun et moi-même avons apporté notre expérience de terrain. A l’extérieur nous tenons à garder une relation la plus familiale possible. »

FF: Quelles sont vont ambitions sportives avec Roubaix sur le court et moyen terme ? Serez-vous à priori Roubaisien l’an prochain ?

NB: « Pour le moment ma seule préoccupation est la pérennité du club en D1 et en ce qui concerne la saison prochaine mes intentions ne sont pas définies. Je reste ouvert à tout nouveau challenge »

FF: Venons-en au côté tactique : comment vous qualifieriez-vous techniquement ? Quels sont les fondements du jeu essentiels qui font que vous êtes aujourd’hui un coach apprécié en France ? Qu’est-ce qui vous distingue ?

NB: « Je ne sais pas comment vous répondre, je fais en sorte de rester moi-même. Il faudrait poser la question aux joueurs que j’ai pu entraîner dans ma petite carrière (rires). Ma philosophie reste néanmoins une préparation « à la Benamrouche » qui, comme le Nutella, reste secrète. (rires)« 

FF: Comment jugez-vous le niveau et la progression du futsal français au cours de ces dernières années ? Que faudrait-il pour passer un cap supplémentaire ?

NB: « Je pense que le rythme est bon et que la Fédération met les moyens en fonction de la structuration des clubs. L’équipe de France avec à sa tête Mr Jacky, permet au Futsal français un développement plus rapide. Pour passer un cap, il faudrait l’organisation d’une compétition internationale en France et l’inscription du Futsal aux Jeux Olympiques. »

FF: Pensez-vous qu’un jour, un coach de D1 issu du Championnat de France pourra devenir sélectionneur de l’Equipe de France de Futsal ?

NB: « Je pense que Mr Jacky fait très bien le travail actuellement car il a de très bon résultats, qu’il y a au final assez peu de coaches français en D1 (rires), et que, pour terminer, être entraîneur et sélectionneur sont deux métiers différents. »

FF: Nous avons appris que vous possédez également la nationalité algérienne. Afin de mieux vous connaitre, pourriez-vous nous en dire plus sur les rapports que vous entretenez avec ce beau pays ? Y allez-vous souvent? Y avez-vous de la famille ?

NB: « C’est vrai. Je vais en Algérie 2 à 3 fois par an dans la maison familiale, j’y ai beaucoup de famille avec laquelle je garde des relations étroites. J’ai un attachement fort à l’Algérie. »

FF: Vous avez sans doute appris, via France-Futsal, qu’un Championnat algérien avait vu le jour il y a deux ans et en est à sa deuxième saison. Suivez-vous la Ligue nationale de Futsal algérienne ? Qu’en pensez-vous ?

NB: « Oui, je regarde attentivement le futsal algérien, notamment via les réseaux sociaux et les médias. J’observe très attentivement les clubs de Béjaia, d’Oran, de Bordj et de Constantine notamment. Bravo à tous les clubs. J’irai d’ailleurs prochainement en Algérie assister à plusieurs matches. Je pense qu’il est possible que l’Algérie devienne une bonne nation du Futsal mondial dans les années à venir. Je suis persuadé qu’il y a suffisamment de qualité dans le pays. Il y a une bonne dynamique insufflée par la FAF qui mettra sans doute de plus en plus de moyens. Il y a du dynamisme et cela est très bien. Si les clubs se structurent, et que l’équipe nationale fait appel à des joueurs locaux de qualité aidés par quelques éléments de la communauté à l’étranger, cela ne peut être que positif. Il n’y a aucune raison que l’Algérie, ce grand pays amoureux de beau jeu, ne soit pas à la prochaine Coupe du Monde, avec un Championnat fort et des clubs au plus haut niveau. »

FF: Quelles seraient les conseils que vous donneriez à tous les coachs et formateurs algériens, qui, comme vous le savez, sont passionnés et désireux d’apprendre ? Seriez-vous prêt à vous rendre en Algérie et à collaborer avec la Fédération pour apporter votre expérience ?

NB: « Si l’on faisait appel à moi, je serais ravi de participer modestement à la formation et à la structuration du Futsal Algérien, à condition de travailler dans de bonnes dispositions. Je serais personnellement prêt à m’engager, pourquoi pas, ainsi que plusieurs acteurs franco-algériens du futsal, à nous rendre en Algérie pour aider les clubs et transmettre notre modeste expérience au travers de cliniques. »

FF: Nous disions qu’après avoir été champion de France avec Garges, vous aviez participé à la prestigieuse Ligue des Champions Futsal de l’UEFA. Qu’est-ce que cela fait d’avoir en quelque sorte marqué l’histoire, en devenant le premier coach algérien à avoir participé à une Champion’s League ? (rires)

NB: « Grande fierté de représenter mes deux pays, la France et l’Algérie, dans cette compétition prestigieuse. Je suis prêt à apporter mon retour d’expérience si besoin. Pour petit rappel, c’était ma quatrième participation (trois avec Roubaix et une avec Garges). »

FF: Venons-en à l’équipe nationale algérienne. Vous savez sans doute qu’une équipe nationale algérienne de futsal est en train de voir le jour ? Nous savons que vous êtes demandé par de nombreux clubs (en France et à l’étranger); seriez-vous intéressé par l’Equipe d’Algérie de Futsal ? La Fédération algérienne de Football (FAF) ou le DTN vous ont t-ils déjà approchés ?

NB: « En tant qu’Algérien, la sélection ne peut se refuser de prime abord. Si une proposition venait à arriver, j’étudierai bien évidemment toute piste de collaboration. Mais rien pour l’instant. Si je devais un jour devenir sélectionneur – je reste très ouvert sur la question, ce serait avec l’unique objectif de hisser l’Algérie au sommet du futsal africain, avec le but ultime de qualifier le pays en Coupe du Monde. Rien d’autre. Je suis un compétiteur. Le vivier ne manque pas. Si la Fédération Algérienne venait à me contacter, le projet pourrait être très intéressant. »

FF: Si l’occasion de choisir se présentait; à choisir entre l’équipe de France ou d’Algérie, quel serait concrètement votre choix et pour quelles raisons ? (Vous avez le choix de ne pas répondre bien sûr – rires).

NB: « Joker ! (rires)« 

FF: Afin de mieux vous connaitre, pourriez-vous répondre à ces quelques questions, sans réfléchir (rires) ?

  • Votre film préféré: Le plus beau des combats (film réalisé par B.Yakin en 2000).
  • Votre plat préféré: La raclette
  • Votre lieu de vacances préféré: le sultanat d’Oman
  • La plus belle ville du monde: Mascate (FF: ndlr, la capitale d’Oman)
  • Le meilleur futsaleur du monde: Falcao (FF: le Brésilien)
  • Votre club de futsal préféré (hors de France): joker
  • Votre championnat de futsal préféré: Espagne.
  • La valeur la plus importante à vos yeux dans la vie: la loyauté.

FF vous remercie du temps que vous nous avez accordé et vous souhaitons une belle saison !

L’avis de France-Futsal: Nordine Benamrouche s’est confié avec transparence et sans langue de bois, se livrant sans détour. Nous avons été touchés par le parcours du coach, mais surtout par le parcours de l’homme, pour qui les valeurs de respect, de partage et de don de soi sont au centre de l’action quotidienne. Cette interview nous aura permis de découvrir l’homme passionné qu’il est et de redécouvrir sous un autre angle le coach rigoureux connu et apprécié des parquets de D1. Si Nordine Benamrouche est si demandé et si plébiscité, ce n’est pas que pour son palmarès éloquent; c’est aussi car il est avant tout un coach humain emprunt de don de soi et de sincérité, respecté de ses joueurs et des spécialistes, tout simplement. Et c’est cela aussi, sans doute, sa plus grande force : amener les clubs où il est passé vers le haut; entre esprit de la gagne et grandeur d’âme. Respect.